La culture de la croissance. Les origines de l’économie moderne, Joel Mokyr

Dans cet ouvrage, qui rassemble le fruit des conférences « Joseph Schumpeter » données par Mokyr à Graz en novembre 2010, Mokyr se penche sur les raisons de l’exceptionnelle croissance économique européenne et offre une position originale en faisant porter le poids de cette exemplarité non pas tant sur les institutions ou les innovations qui la sous-tendent que sur la nature de la culture européenne. Comment le changement culturel qui s’est produit en Europe sur la période 1500-1700 permet-il d’expliquer l’exceptionnelle croissance économique de l’économie moderne. Cette situation est le fait d’entrepreneurs culturels [cultural entrepreneurs] qui furent suffisamment influents pour changer le menu culturel et persuader une foule d’individus d’adopter leur variante culturelle. Nous reviendrons dans cet article sur l’origine de la thèse de Mokyr avant d’en souligner les arguments principaux. Ce faisant, nous interrogerons la définition de l’entrepreneur culturel proposée par Mokyr et nous dresserons un parallèle avec la littérature sur l’entrepreneuriat et l’entrepreneuriat culturel plus particulièrement tout en mettant en perspective la thèse de Mokyr.

La thèse de Mokyr présentée dans l’ouvrage A culture of Growth est l’aboutissement d’un ensemble de travaux réalisés sur les origines de la croissance économique moderne. Une première version de la thèse de Mokyr a été publiée en 2005 dans The Journal of Economic History sous le titre The Intellectual Origins of Modern Economic Growth

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Walter Eucken, entre économie et politique, Patricia Commun et Raphaël Fèvre

Depuis la publication en 2004 des cours de Michel Foucault au collège de France (Foucault 2004), l’intérêt pour l’ordolibéralisme ne faiblit pas. Régulièrement convoqué aussi bien dans le débat public que dans la sphère académique (Dardot et Laval 2009), ce courant de pensée incarne une certaine tradition de politique économique initiée en Allemagne après la seconde guerre mondiale et connue pour avoir exercé (et continuer d’exercer) une influence dans la conduite des politiques économiques de l’Union européenne. Tantôt encensé comme modèle de réussite économique à l’allemande (Weisz 2001), tantôt vilipendé comme « cage de fer » pour l’Europe (Denord et al. 2015), l’ordolibéralisme cristallise et exacerbe bien souvent les clivages politiques, au prix hélas de fréquentes confusions théoriques. Ainsi en va-t-il par exemple des raccourcis souvent effectués entre les politiques de libéralisation des services publics ou les mesures de rigueur budgétaire et l’ordolibéralisme, dont l’apport est parfois surestimé.

C’est dire tout l’intérêt qu’éprouveront les lecteurs curieux de ces débats contemporains à lire l’ouvrage que consacrent Patricia Commun et Raphaël Fèvre à la principale figure historique de l’ordolibéralisme, Walter Eucken. À rebours des polémiques et des amalgames entre les différentes versions du néolibéralisme, les auteurs nous livrent ici des développements inédits, à partir d’un article original directement traduit de l’allemand, permettant de cerner avec une rigueur et une justesse bienvenues ce qui constitue le cœur et la spécificité du programme ordolibéral…

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Dictionnaire des biens communs, Marie Cornu, Fabienne Orsi, Judith Rochfeld (dir.)

(Paris, PUF, 2017)

Comment définir un recueil de définitions ? Autrement dit, qu’est-ce qu’un dictionnaire ? En français, le mot dictionnaire est relativement récent (vers 1501) ; il est issu du latin médiéval dictionarius, venant lui-même du latin classique dictio, -onis (« action de dire, propos, discours »), avec le suffixe locatif -arium. L’espagnol diccionario (début xvie siècle) et l’italien dizionario (dittionario, 1568) ont – manifestement – la même origine. En parcourant (en ligne) le dictionnaire Le Larousse, nous trouvons quelques lignes largement partagées : « ouvrage didactique constitué par un ensemble d’articles dont l’entrée constitue un mot, indépendants les uns des autres et rangés dans un ordre déterminé, le plus souvent alphabétique ». Si on veut rester fidèle à cette définition, il faut reconnaître que le Dictionnaire des biens communs, ouvrage coordonné par Marie Cornu, Fabienne Orsi et Judith Rochfeld, n’est pas vraiment un dictionnaire, ni un vocabulaire ou un lexique ; il s’agit plutôt d’un instrument utile, un « outil critique », pour naviguer à travers l’univers riche et complexe des communs dans toutes leurs dimensions. En effet, le titre que les trois spécialistes avaient proposé au départ était Dictionnaire critique des communs ; c’est l’éditeur qui a décidé de mettre en relief la notion de « bien commun » afin de s’adresser à un public plus large. Comme il est écrit dans l’Introduction, le terme de bien commun risque cependant de dissimuler la complexité des questions soulevées…

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Critique of Mainstream Austrian Economics in the Spirit of Carl Menger. Antal Fekete

(Pintax cvba, 2017)

Le livre rassemble des conférences données par le Professeur Anton Fekete en septembre 2012 à Munich à la New Austrian School of Economics. Le livre est court, une centaine de pages pour le cœur du texte et une vingtaine de pages supplémentaires pour l’avant-propos de l’éditeur, l’index et la table des matières. Le texte comprend 21 chapitres et une annexe. Le titre choisi est quelque peu trompeur. En fait, Fekete propose une discussion sur les idées de Ludwig von Mises dans la perspective de Carl Menger (1981). La principale référence retenue pour Mises est Human Action (1998). Le but est d’améliorer les concepts de Mises ; la critique aborde certains aspects de Human Action afin d’offrir des solutions dans une perspective mengerienne. Fekete admire visiblement Mises et sa vie présente des similitudes avec celle de Mises. Ainsi, ils ont chacun fui un régime totalitaire pour sauver leurs vies et ont vécu en exil.

Néanmoins, il s’agit d’une véritable critique des travaux de Mises. L’intérêt du livre est double. D’abord, il n’existe que très peu de livres présentant Mises de manière concise. Celui de Percy Greaves Mises Made Easier (1990) vient à l’esprit, mais il était conçu pour aider l’étudiant à lire Human Action. Il est donc très lié au texte et au contexte original. Ce livre présente une perspective différente et offre une discussion de problèmes contemporains avec un vocabulaire actuel. Par exemple, la crise du logement et les problèmes monétaires de la Vienne des années 192…

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Just Playing, Ken Binmore

Abstract

The article is an attempt to clarify the relationship between economic models and mechanisms. The latter refer to causal processes and interactions. What role do they play in models? One must distinguish between models as non-linguistic constructs and models in the more usual sense of formal systems of definitions and mathematical relations. Models in the second sense are interpreted as purporting to characterise or describe in part models in the first sense. Thus the fact that there is no explicit reference to process-based mechanisms in many formal models does not mean that these mechanisms do not play an essential role in the non-linguistic models that these formal models describe in an incomplete way.

Keywords

Economic Models, Economic Mechanisms, Deductivism, Isolated Systems

JEL Classification: B41

The social responsibility of firms: An ethical leap across a legal void?, Sophie Swaton

Abstract

Despite its present-day success story in the field of management, corporate social responsibility (CSR) is not a new concept, but one that emerged in the 1950s. One may therefore wonder about such a resurgence for a concept whose interpretations are numerous and sometimes quite opposed to one another. Our hypothesis is that CSR, understood on a very topical functional level, results from a deficiency of substantive law. This gap could also explain the evolution of the historical and conceptual approach of CSR, perceived on a second level: the need to seek a foundation in ethics first, and then in political philosophy. However, such a search for foundations does not necessarily succeed. Nevertheless, far from limiting ourselves to a critical standpoint, we try to propose here a clarification of CSR and all the levels involved, in particular the ethical standpoint, which could be more deeply analyzed.

JEL classification: B20, B52, M14.

Keywords

  • responsibility
  • ethics
  • shareholders
  • contracts
  • norms
  • deliberation

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